Comme dans tous les domaines que l’homme a voulus façonner ou dans lesquels il est intervenu, il est allé trop loin. Nous avons remplacé le bon sens par la logique économique ! Le pognon, faire du fric, gagner de l’argent est devenu la référence pour reconnaître la compétence. C’est devenu un modèle de reconnaissance. S’il gagne du fric, s’il est plein d’oseilles, c’est qu’il est bon ! Ça ne veut pas dire qu’il soit mauvais non plus. C’est juste que l’argument est un peu risqué. Quand on voit toutes les grandes entreprises, les multinationales, qui pèsent des milliards, on peut s’interroger sur leur motivation. Veulent-ils sauver l’humanité en proposant des produits fabuleux et utiles ou cherchent-ils juste à peser des milliards en bourse ? Sans compter que de l’autre bout de notre consommation, certains sont exploités, la nature dévastée comme nous ne l’admettrions plus dans nos pays riches. C’est une course à celui qui gagnera le plus, le plus vite, sans se soucier de ce qu’il laissera derrière lui. C’est une course à l’orgueil, à la démesure, à la désinvolture ! Je ne suis pas antispéciste, je serais même plutôt humaniste, mais force est de constater que l’humain est devenu la pire des « créatures ». Je reprendrais la question de départ : Nos chiens ont-ils un avenir ? Si nous continuons sur ce chemin : « Non » !!! Nos enfants non plus d’ailleurs ! D’après la NASA, ça se compterait en décennies !!! Soyons optimistes! Alors je ne vais pas vous parler d’environnement, car ce n’est pas l’objet de ma page, mais du chien et de son avenir, qui comme dans tous les domaines a subit l’inconséquence de notre système économique. Brossons le tableau. De plus en plus de gros élevages où le chiffre d’affaire et la quantité, l’ont emporté sur la qualité. De plus en plus de jeunes qui sortent des écoles, sans savoir ce qu’ils feront réellement à la sortie de celles-ci. « Vous serez ouvriers, ramasseurs de merdes, pardon, « agent excrémentateurs » (C’est plus valorisant !!) chez des patrons qui ne comprendront pas votre manque de motivation, qui vous feront passer pour des feignants, des branleurs ». Et le gentil patron de dire : « Je ne comprends pas, ramassez des merdes toute la journée dans nos usines d’élevage où les chiens sortent deux fois par an de leur 5 m² de béton, c’est pourtant gratifiant ». Ne parlons pas de toutes ses formations, qui n’ont plus aucun sens, qui ont basculé dans le productivisme et « l’élevage de stagiaires ». Des jeunes en échec scolaire qui suivent la filière canine, car ils aiment les « bêtes », mais qui n’ont aucune idée de ce que représente l’élevage et qui pour la plupart, n’ont aucune passion. Pourtant, dans ce métier difficile, la passion est notre plus grande force et parfois notre salut. Une SCC en bout de course, qui a perdu le fichier d’identification des chiens et qui peine à s’en sortir, qui est comme toute entreprise ou association, qui a des salariés et qui doit donc rendre des comptes financiers équilibrés. Qui doit donc concilier et accepter l’inacceptable. Certains élevages, multi-races, qui, d’un côté sont spécialisés pour une, qui sont parfois les meilleurs de celle-ci et contribuent à son amélioration, produisent de l’autre, une multitude de races, qui ne les passionnent que pour l’argent qu’elles ramènent et qui, non seulement ne les améliorent pas, mais au contraire les discréditent ! La sélection a perdu la guerre contre la production ! Un système exposition où de plus en plus de chiens sont sous anxiolytiques, psychotropes et autres substances, pour supporter de se promener sur un ring. Un modèle éducatif élitiste pour le particulier, imposé par un système élitiste qui pousse le particulier à tenter de l’imiter en espérant au fond de lui qu’il n’y parvienne jamais. Et oui, qui admireraient l’élite, si tout le monde était l’élite !!!? Une sorte de « trumpinisation » (Mot inventé qui signifie : nier l’évidence) des modèles éducatifs qui ne fonctionnent pas ou disons, qui ne sont pas assez adaptables pour la grande majorité des usagers, des maîtres, qui recherchent autre chose. Des banques qui préfèrent la spéculation au financement des entreprises et qui n’ont jamais vraiment cru à la filière. Des normes sanitaires basées sur quelques mètres carrés en guise de bien-être animal, sans « contrôle technique » des géniteurs, qui pour beaucoup sont stressés et inaptes à la reproduction. Les lourdeurs administratives, où nous passons de plus en plus de temps à remplir de la paperasse qu’à travailler. Des professionnels qui s’aiment trop et qui rêvent d’une reconnaissance internationale à la César Milan et des naïfs qui les honorent tellement que certains ont choppé une tendinite, voire se sont luxés la langue, tellement ils l’enfoncent profondément dans le rectum de ceux qu’ils vénèrent (Dans la profession, la luxation de la langue va bientôt être reconnue comme « maladie professionnelle). Un discours qui se complexifie, qui se technicise, comme pour vouloir montrer la supériorité de celui qui en use. Un support marketing de plus en plus sophistiqué, des images manipulées, où on enlève ce qui fâcherait. Des chiots qui sortent des usines sans être pré-socialisés, ce qui permet à la filière « rééducation », qu’elles soient techniques ou chimiques de faire du fric. Des professionnels qui préfère la rééducation à la logique de la normalité. Des syndicats qui végètent, qui font ce qu’ils peuvent, bien souvent autocentré sur une vision, sans ouverture, sans acceptation de l’autre, de sa vision qui diverge. Des politiques qui s’en foutent, au point de filmer à l’Élysée, le chien du président en train de pisser sur une cheminée. Des professionnels, qui se mènent une guerre, stupide et qui apporte plus de contraction que de solutions. Des camps qui s’établissent en suivant des meneurs autoproclamés et intransigeants.
Alors Le chien est-il mort ? Les jeunes n’ont plus d’avenir dans ce domaine…
Heureusement que non ! Les chiens m’ont tant apporté et m’apportent tellement au quotidien. Il y a tant de choses à faire, à devenir dans la filière. C’est presque inépuisable. Le chien est un vrai lien social. Mais si j’ai un conseil à donner à la jeunesse, à la relève, ne vous lancez pas dans le chien, si au fond de vous la passion ne vous anime pas. C’est la passion qui vous portera. C’est elle qui vous donnera envie d’aller toujours plus loin, d’en apprendre toujours plus et de supporter les revers, qui peuvent être durs et décourageants. Envoyez chier les vieux cons, dont je fais un peu parti et creusez votre sillon. Mais creusez-le avec déférence, respect, patience, écoute et humilité. Ayez foi en vous. Ayez foi en nos institutions canines, qui ne sont certes pas parfaites, mais qui sont un support indispensable. D’ailleurs l’institution n’est qu’un outil aux mains de l’homme. Si l’outil est défectueux ou qu’il ne remplit pas sa fonction pour lequel il a été créé, il suffit parfois de le changer de main pour qu’il retrouve toute son efficacité. Nos institutions doivent évoluer, se régénérer, vivre l’époque, sans regarder ou regretter celle qui se termine. C’est aux jeunes de faire le chien de demain. C’est eux qui porteront des projets, des idées nouvelles, qui auront la force de les mener à bien. Si l’expérience est une fondation sûre et solide, elle n’est pas tout. La passion peut bouleversée ce principe et donner de belle leçon d’innovation et d’efficacité. L’expérience n’est pas le seul gage de qualité. Si votre longue expérience est de n’en avoir qu’une, qui est restée la même toutes ces longues années, mieux vaut s’en méfier ! Comme je l’ai écrit dernièrement : « Nous avons de l’expérience qui nous permet d’en créer d’autres » ! Certains jeunes, qui pourtant avaient du potentiel ou en ont, ont été dégoûtés par certains « gros élevages », des usines à produire qui, pour certaines formations, sont des modèles économiques, mais qui humainement n’en sont pas. Après comment voulez-vous que les formations se positionnent pour le jeune, quand ce genre de structures leur prend 5, 6, 10 stagiaires par an ! Elles pourraient tuer leur centre de formation. L’avantage d’être allé dans ce genre de structures, c’est que vous saurez, si vous avez de l’affection pour les chiens et de la reconnaissance de ce qu’ils vous apportent ou vous apporteront, vous saurez, donc, ce que vous ne voulez pas. Je vous rassure « les jeunes » (jeunes dans la profession), ces modèles n’en sont pas. En tous cas, pas des bons. Faites votre propre modèle, avec vos propres convictions, vos connaissances, vos compétences et devenez vous-même, sans jamais oublier que ce sont les chiens qui vous font vivre. Ne suivez pas des modèles de productivité où le fric est la motivation, mais au contraire prenez la voie de l’exclusivité (Une race, mais bien), de l’originalité (Un projet personnel) , du concentré (Moins mais bien) et vous gagnerez votre vie. Quand on y croit, Quand on est motivé, quand on est passionné, on trouve des moyens pédagogiques pour convaincre. Aujourd’hui la filière s’ankylose, vit sur ses acquis, sur ces certitudes, ses vérités, son expérience. On voit le résultat. Un chiot sur deux, d’après Piaget, est déficient, présente des carences psychologiques. Alors force est de constater que les voies que l’on a choisies ne sont pas les bonnes. Aujourd’hui, plus de conseilleurs, un éducateur par village, tout le monde est éducateur (!!!), un million de chien en moins et autant d’abandons. En fait, plus d’abandons en proportion puisque la population a perdue 1 millions de sujets ! Si ça, c’est un modèle à suivre, où allons-nous ? Vous avez tout pour réussir ou mieux faire que notre génération. La science à progresser et nous permet de mieux cerner nos chiens, même si elle manque un peu de vulgarisation dans ses ouvrages ! Des statuts plus allégés nous permettent de minimiser les risques d’une installation. Une prise de conscience sur le statut de l’animal. Des moyens de communication plus rapides, (bon, trop parfois et qui génère plus d’émotion que de raison !), mais qui reste de bons supports. La seule chose qui manque à votre génération et qui peut être fatale : La patience. Il faut être patient, savoir attendre ce qui tarde à venir, vous remettre en question, recommencer sans se décourager. On vous a tellement pourri gavé, en vous couvrant de merdiers, sans que vous ne soyez obligé de le mériter, que quand la réalité s’impose, elle est dure à accepter. Il faut du temps pour construire, se construire, s’accomplir. On est dans une sorte de paradoxe, notre époque est un paradoxe. La communication va plus vite que la construction. Alors soyez patient, passionné et vous réussirez. Encore un dernier conseil. Ne vous enfermez pas, mais au contraire, rencontrez. Les rencontres permettent de trancher et d’asseoir vos convictions. Personne ne détient la vérité, mais chacun a la sienne et la développe. Mieux je l’espère que notre génération, qui, au vu des résultats, n’a aucune leçon à donner. Bonne journée
Etienne Girardet