La pré-éducation canine est difficile à définir. Ce dont on peut être sûr et qui devrait être consensuel, c’est que son « action » est préventive. Si je devais la définir clairement, ou tenter de le faire, je dirais : « La pré-éducation canine est une préparation, un « échauffement », un temps de réflexion nécessaire et de travail indispensable pour ouvrir le chien à l’attention et à l’intérêt au maître. Elle se définit à l’instant où le chiot naît et où il recevra les premières bases, comme l’incontournable pré-socialisation, que seul l’éleveur peut dispenser. Puis un homme, qui deviendra « peut être » un maître, s’interroge. L’idée de prendre un chien germe dans sa tête. Il s’y prépare, jusqu’au jour où il ira le chercher et franchira le pas. Il aura reçu un premier enseignement pour bien choisir en évitant le chiot pathologique. De là, l’homme aura quelques mois pour que le chiot ait atteint une sorte de maturité admissible pour débuter une éducation plus technique, plus “conditionnementale”. Mais il n’aura surtout que quelques mois pour construire ce fameux lien qui devra l’unir à son chien. (Le lien est la clé de la réussite) La pré-éducation canine est donc une démarche préventive, une sorte de processus prophylactique qui, au départ, s’attache à la construction de l’équilibre mental du chiot pour gagner, ensuite, l’éducation du chien, en passant par une construction saine et fondamentale du lien. Il ne pourra y avoir de stabilité éducative qu’à partir du moment où il y a déjà un équilibre mental et surtout une connexion entre le maître et son chien ». Qui est donc le pré-éducateur ? Le pré-éducateur n’est pas nécessairement un éducateur canin qui se serait spécialisé. Il est au départ l’éleveur qui conseillent et orientent le maître dans son choix. L’élevage est le point de départ de la démarche. Un éleveur qui s’évertue à produire des chiots sains, manipulés et équilibrés est déjà, selon moi, un pré-éducateur. Combien de chiots sont déjà « pathologiques » à la sortie de certains élevages… (Attention, un article viendra sur l’élevage pour définir ce que j’entends par élevage) c’est une triste réalité ! Le pré-éducateur est l’ensemble de ceux qui, avant l’achat, au moment de recevoir l’animal et quelques semaines après son entrée au sein de la famille, prodiguent les bons conseils, donnent aux maîtres le tempo d’un bon départ. Mais ne nous trompons pas. Si le pré-éducateur est celui qui conseille avant le « grand saut », il est bien entendu que la nature du conseil doit émaner d’une compétence. Jamais nous ne pourrons admettre qu’un simple bedeau, juste parce qu’il «aime les chiens », puisse entrer dans le cénacle des pré-éducateurs ! D’ailleurs la pré-éducation canine doit farouchement s’opposer à ceux qui, dans la rue par exemple, s’immiscent dans la vie des maîtres en se permettant de les juger ou de les « conseiller ». Le jugement est un cancer… surtout quand il provient de l’émotion, d’une sorte de spontanéité irréfléchie qui s’abat sur un maître comme l’autour sur un perdreau. La pré-éducation n’est donc pas, comme s’en moquaient certains professionnels, tandis que j’exposais mes idées, en clamant que je n’avais rien inventé, (je n’ai jamais eu cette prétention) un simple conseil sur le bon choix. Vous pouvez donner à un maître l’ensemble de votre bagage de compétences, le former à l’excellence, lui ouvrir l’esprit au point qu’il devienne l’extension de vous-même, il n’est pas couru d’avance qu’il réussisse ! “C’est un peu comme si vous possédiez une graine dont le potentiel est si grand qu’elle peut sauver le monde et que vous ne disposiez plus que d’une terre stérile pour la semer ! Même si la graine est exceptionnelle, dispose d’un bagage génétique incomparable, jamais elle ne pourra germer si ce qui la reçoit n’a pas le même potentiel. Une graine, aussi riche soit-elle, n’est rien si le sol est pauvre. C’est un tout ! “Notre maître, même bien conseillé, n’aboutira à rien si la société dans laquelle il évolue avec son chien est devenue une sorte de tumeur qui le juge, le critique, l’insulte, le stigmatise. La pré-éducation canine n’a pas la « pauvre » ambition de donner quelques conseils pertinents à une personne qui s’interroge sur l’à-propos d’un choix, celui de prendre un chien. La pré-éducation canine a le devoir de changer la société pour que celle-ci devienne une terre d’accueil, un territoire de bienveillance et non plus une arène où un individu est devenu le gladiateur de l’autre. Nous ne réussirons jamais à inverser la courbe de la misère canine en développant des concepts, fussent-ils remarquables, si la société est sclérosée, malade ou malveillante. Beaucoup me diront : « bonne chance » ! C’est vrai que seul, la tâche serait insurmontable, titanesque et avorterait aussi rapidement qu’a surgi l’idée dans ma tête. Mais si nous nous rassemblons, si nous mettons nos divergences de côté, si nous ne nous enfermons plus dans nos certitudes et si nous sommes capables d’en recevoir de nouvelles, si nous nous ouvrons à l’autre, aux autres, comme la terre se disloque pour laisser la graine germer, il se pourrait que nous réussissions. N’oublions jamais que de la meute naît la force ! La pré-éducation est un tout. C’est en fertilisant la société d’un engrais de bienveillance que la pertinence de nos conseils germera dans la réussite ! La pré-éducation canine est l’ensemble de ce qui permettra à la société d’avoir un autre regard sur les chiens et les rapports que nous entretenons avec eux. On pourrait presque dire que tous les intervenants qui, de près comme de loin, permettront ce changement seront des pré-éducateurs. Les médias, qui diffuseront nos idées, en seront ; les fabriquant d’aliments en seront ; les concepteurs d’accessoires en seront ; les conseilleurs spécialisés en seront eux aussi, attendu que leurs conseils soient pertinents ; les élus, qui nous ouvriront les portes de leur communication, en seront eux aussi. L’éducateur canin, quant à lui, devra être le technicien, l’artisan du lien qui doit unir un homme et son chien, le pédagogue qui aura le rôle de l’expliquer, de le démontrer et surtout d’aider le maître à le construire. Si l’éducateur canin devient ce pédagogue de la simplicité, ce spécialiste de la technique qui devra donner envie au maître de s’investir, pas nécessairement en temps, mais en efficacité, la bataille contre l’abandon sera gagnée. Même si la pré-éducation canine a mille visages, l’éleveur et l’éducateur canin en resteront les acteurs principaux. Le premier doit immanquablement construire une sorte de lien primaire, qui permet au chiot de reconnaître l’homme comme une espèce amie. C’est la phase de la pré-socialisation, entre la 3ème et la 7éme semaine après la naissance. Si l’éleveur faillit, par négligence, par manque de temps, il sera plus difficile au maître d’instaurer un lien affectif sain. L’éleveur est le point de départ du projet. Son rôle est fondamental. C’est pourquoi, ceux qui s’évertuent à produire des chiots d’excellence doivent être reconnus et montrés en exemple. Nous devrions les estampiller d’un label de reconnaissance. Sans leur bon travail, il sera difficile de lutter contre l’abandon. Nous reviendrons sur l’élevage. Le second, à savoir l’éducateur canin, devra non seulement bien conseiller sur le choix de la race, mais aura surtout le rôle d’ouvrir l’esprit du maître. Il devra, et ce ne n’est pas le plus simple, trier le faux du vrai. Parfois j’ai l’impression que nous ne sommes plus des éducateurs, mais plutôt des éboueurs canins qui pratiquent une sorte de tri sélectif pour assainir le discours ! Nous ne pouvons plus, aujourd’hui, ne nous contenter que de pratique et d’apprendre aux maîtres l’utilisation du matériel. Chaque nouveau client doit suivre une petite formation « théorique » qui lui permettra de « faire le ménage » dans sa tête. Si l’éducateur n’aide pas le maître à y voir clair, jamais son chien n’arrivera à voir clair en son maître ! C’est une évidence. Chaque chose gravée dans la tête influence une attitude. Si les idées stockées sont contradictoires, les messages que le maître enverra à son chien le seront tout autant. Mais s’il est important de « toiletter » les connaissances de nos maîtres et de les aider à ne garder que l’indispensable, il est fondamental de ne pas remplacer un discours partisan, un peu utopique ou carrément hypocrite, par un autre plus indigeste. Il faut clarifier, simplifier et aller au but. Plus l’éducateur sera simple, plus grande sera la réussite du maître. Mais la simplicité, c’est compliqué. Elle nécessite beaucoup de préparation, de réflexion, de construction. Nous constatons tous les jours que les chiens venant en cours sont de moins en moins « bien dans leurs pattes ». De plus en plus de chiens sont psychologiquement instables. Il est temps d’agir et de proposer autre chose, une approche plus responsable qui devra être prise en compte dans l’enseignement spécialisé. Nous devons sensibiliser les étudiants, les élèves, les stagiaires à une sorte de « gestes des premiers jours ». Qu’il s’agisse de pré-socialisation, des techniques qui permettent de « pré-fixer » les chiots à l’homme, jusqu’aux conseils à dispenser aux nouveaux maîtres, la formation reste incontournable. Nous devons réorienter nos méthodes éducatives, qui ne sont plus adaptées à l’homme moderne et qui sont une survivance des techniques de dressage inadaptables de nos jours. Beaucoup de professionnels pensent que le maître est devenu paresseux. Les maîtres ne sont pas fainéants, ils n’ont juste plus ou moins de temps! Soit nous proposons un concept qui optimise le temps, soit nous continuons à défendre l’idée « culpabilisante » qu’il en faut beaucoup pour éduquer un chien et que celui qui ne le prend pas est un mauvais maître. Nous devons proposer un concept plus épuré. Ce faisant, non seulement nous ne scierons pas la branche sur laquelle nous vivons, mais du coup, d’autres branches repousseront… car si nous dispensons les bonnes clés aux futurs professionnels, aux nouveaux « pré-éducateurs » canins, qu’ils soient éleveurs ou éducateurs, il se pourrait que nous arrivions à passionner les maîtres à aller plus loin, à en faire plus, comme de suivre une sorte de « CSAU amélioré, revisité et modernisé » que nous pourrons peaufiner ensemble et qui sera plus adaptable au monde dans lequel nous vivons. Beaucoup de maîtres ne veulent pas prendre de cours, car ils ont de l’éducation cette seule image du compétiteur, qui arrive à faire faire à son chien ce qu’ils n’auront jamais ni le temps, ni la compétence de mettre en place. Là où nous serons innovants, c’est en proposant du simple, de l’épuré, une base réalisable pour tout le monde, un « minimum » éducatif, celui qui permet au maître de ne pas entrer dans la spirale de l’échec et au professionnel de se crédibiliser en proposant des conseils avisés. Ce qu’il faut développer et qui est la base de la pré-éducation est le « lien ». Cette ficelle imaginaire qui relie un maître à son chien restera la plus sûre des valeurs, celle qui freinera la misère canine, car on ne se sépare pas d’un animal avec lequel nous avons tissé des liens affectifs. La pré-éducation a trois casquettes, trois origines, trois piliers. Ce que j’appelle « le triumvirat de compétences ». La première est le monopole de l’éleveur, qui s’assure de produire des chiots sains. La deuxième est un conseil, mené par « les conseilleurs », qui doit aider à lutter contre les idées reçues pour permettre au maître d’agir sans réfléchir et surtout de bien choisir. La troisième est le démarrage éducatif, qui est l’apanage de l’éducateur canin et qui doit aider le maître à construire le lien en évitant au maximum qu’il éduque son chien à la désobéissance. La pré-éducation doit aider les maîtres à prendre conscience que chaque chose que l’on apprend à son chiot peut être bénéfique ou peut devenir un problème. D’un côté, elle construit, produit sainement, de l’autre elle ouvre l’esprit pour au final dispenser la technique et la logique d’un bon départ. Mais là où la démarche est et sera moderne, c’est qu’il se pourrait qu’elle permette le consensus, une sorte de concorde universelle entre les différents courants éducatifs. La pré-éducation est acceptable par tous, car elle demande du doigté, de la précision et s’oriente sur une méthode où la confiance se gagne dans la patience et le respect, où la complicité s’acquiert dans la cohérence, la constance et le jeu. Nous ne convaincrons pas les « intégristes » de la cause, les imbéciles “belliqueux” qui existent par la guerre qu’ils entretiennent, mais nous ouvrirons l’esprit de ceux qui admettront qu’il n’est plus acceptable de conduire les maîtres vers le chemin inexorable de la rééducation, qui, elle, est indéfendable. Il se pourrait que nous réussissions à rassembler sur l’idée simple que la prévention est et restera l’unique voie de la réconciliation. Celle qui évite les outils contestés, les techniques controversées. Un chiot se démarre simplement!!! https://www.youtube.com/watch?v=NSSjKYS51e4 Comment choisir un chiot en toute confiance. C’est en s’appuyant sur ce genre de petites vidéos explicatives, peu coûteuses que nous placerons les maîtres en position de vigilance. Ce test en dit long sur l’attention que l’éleveur a prodigué à sa portée. Vous comprendrez bien, qu’il sera impossible de faire ce test en animalerie, par exemple!!! Voilà ce que nous pourrions tous proposer comme petits supports pour aider les maîtres à mieux choisir. C’est mieux et plus judicieux que de poster des vidéos où on fait la “propagande” et la promotion de la rééducation et des rééducateurs. “Prévenir pour ne pas avoir à guérir”. Bonne journéeEtienne Girardet
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